L’un des enjeux de la conférence de Rio pour la délégation camerounaise, sera de pouvoir échanger avec d’autres pays sur le moyen de sortir de cette difficile équation
Selon le constat de nombreux experts et une thèse aujourd’hui admise dans un récent rapport de la conférence des nations unies pour le commerce et le développement (CENUCED), les logiques de développement du Cameroun comme dans beaucoup de pays d’Afrique Subsaharienne reposent malheureusement sur une utilisation irrationnelle de ses matières premières (bois, mines, pétrole) mais aussi une exploitation inadéquate de certains de ses produits agro industriels comme la banane plantain, le cacao, le café, l’hévéa ou encore le palmier à huile. Principale conséquence liée à cette situation, le renforcement des inégalités sociales et avec elles toutes ses conséquences socio-économiques, et aussi la dégradation irréversible des ressources naturelles du sol et du sous-sol. La caractéristique première des ressources du sol et du sous-sol au Cameroun est qu’elles sont sources de devises, dont son économie a besoin pour équilibrer ses comptes extérieures. Des comptes, qui soutiennent la capacité à s’endetter à l’extérieur (pour financer son développement), les importations très fortes du marché local et la balance des paiements. Au-delà de tout débat économique, le dilemme de la durabilité au Cameroun se pose de manière simple. Le pays a un tissu industriel et agricole faible, ce qui pousse son marché à importer. Dans la logique économique, pour chaque bien importé, chaque camerounais aurait dû produire la ressource (devise) équivalente. Or à peine 30% des devises sont produites par des investissements nationaux, ce qui accroit la faille entre ressources produites par habitant et besoins d’importation. Pour combler le gap, le gouvernement encourage encore plus d’exploitation de ressources, entrainant plus de dégradation de l’environnement et de l’équité sociale notamment à travers des investissements de rente, à faible valeur ajoutée, et en provenance de l’étranger.
Avec 8% de points de croissance cumulés au cours des années 2010, 2011 et depuis l’entrée en vigueur de leur document de stratégie pour la croissance et l’emploi (DSCE), les dirigeants camerounais semblent aujourd’hui convaincus d’avoir pris le bon chemin pour la reprise du développement dans le pays. Les perspectives pour 2012 prévoient d’ailleurs un taux de croissance à plus de 5%, grâce entre autres à la poursuite des efforts dans le démarrage des grands chantiers notamment dans le domaine des infrastructures de transport (port de Kribi) et de production d’énergie (Memve’ele, Lomp Pangar). Les efforts du gouvernement dans cette logique, et dont le but affiché est de déverrouiller les contraintes de l’économie et permettre l’accroissement des richesses. Un risque demeure cependant sur la structure qui sert de base à la poursuite de ces objectifs. C’est celui de la durabilité des efforts fournis et aussi des gains qui en découleront. Des experts estiment que cette architecture de l’économie, semble une fois encore conduire le pays, vers un chemin qui dans les années 90, a montré de grosses limites. La forte croissance que le pays avait connu durant les années du boom pétrolier et des produits de base (cacao et café) parce qu’elle n’avait pas pris en compte l’aspect de durabilité, a entrainé le Cameroun vers un effondrement social avec la longue crise économique. Le pays ne s’en est sorti finalement, que grâce au douloureux processus d’une initiative en faveur des pays pauvres et très endettés (PPTE). Le gouvernement qui semble avoir pris conscience de la situation, a inscrit à l’ordre du jour, l’aspect durabilité dans son processus de développement. Seulement les politiques en la matière, sont plus orientées vers la protection de l’environnement physique, et un peu moins vers l’amélioration du capital sociétal. Selon plusieurs analyses contemporaines, au-delà d’être un simple paramètre, la durabilité aujourd’hui doit devenir un objectif à part entière de développement économique. Avec le sommet qui s’ouvre à Rio, le Cameroun pourra saisir l’occasion d’apprendre des autres, en vue de mieux aborder ses propres problèmes et défis, notamment dans le domaine de l’auto industrialisation, l’amélioration de l’accès à des énergies renouvelables et à une agriculture à fort rendement.