La révolution silencieuse ou le réveil des consciences en Afrique

Par Michel Lobé Etamé, journaliste

Je reçois tous les jours une vidéo, un texte ou une image figée sur les réseaux sociaux. Ce phénomène n’est pas nouveau. C’est un mode de communication de la société numérique qui traduit une angoisse, un besoin de partage et parfois très souvent, un cri d’amour ou de désespoir. Le contact physique se raréfie alors que les réseaux sociaux nous rapprochent pour se donner bonne conscience.

Je me délecte à lire ces textes et à visionner ces vidéos, tous plus ou moins loufoques. Il en ressort un sentiment unanime: le réveil des esprits. C’est une étape importante qui conduira au réveil des consciences, à l’évolution démocratique de l’Afrique qui est indispensable pour sortir de la grande nuit.

Les thèmes sont multiples et variés: la brutalité des forces de l’ordre, la corruption, le népotisme, le tribalisme, le clientélisme, les élections truquées, la françafrique, le franc CFA, les présidents qui s’éternisent au pouvoir, les constitutions bafouées, le rôle trouble des ONG, etc. Mais on y trouve aussi les faits divers au quotidien et cette frénésie religieuse de tous ceux qui ne croient plus en leurs dirigeants.

Tous ces thèmes, jusque-là tabous, sont traités à travers les réseaux sociaux. On y découvre des aberrations sur l’origine du franc CFA, du rôle très actif de la françafrique, de l’influence de la maçonnerie, du pacte colonial ou des accords de coopération signés lors des indépendances des états de l’Afrique francophone, des séjours permanents et prolongés du président Paul Biya en Suisse aux frais du contribuable, de la religion Vaudou, etc. Tous ces sujets méritent un débat national et continental. Mais les pouvoirs en place ne le supporteraient pas. Pourquoi?

Les intellectuels africains sont les grands absents du dialogue informel sur le net. Ils ont tort de ne pas participer à ce mouvement inclusif en s’arcboutant derrière un déclinisme pathétique qui les caractérise. Les nouveaux médias, à la portée de tout le monde, véhiculent la démocratie, l’état de droit et la bonne gouvernance.

Les réseaux sociaux nous comblent et font le bonheur des sans voix. Ils irritent les autorités habituées à inonder les médias par leur pensée unique. Ce privilège est révolu.

Une catégorie de citoyens méprisés monte au créneau. Leurs revendications s’ajoutent à leur colère. On y trouve des vérités gênantes pour les pouvoirs en place. On y apprend que certains présidents africains sont des marionnettes. Cette vérité n’est pas nouvelle. Mais elle s’amplifie et circule dans toutes les strates de la société.

Les blogueurs du web inondent la population d’informations très souvent concordantes. Les médias traditionnels à la solde du pouvoir sont délaissés. Les pouvoirs paniquent. La gestion calamiteuse des richesses est décriée. Le mensonge permanent s’étale sur le Web. Le roi est mis à nu. Ils n’ont pas le contrôle de la toile et s’en inquiète.

Au Cameroun, les autorités continuent à user des vieilles méthodes héritées de la colonisation. Pour étouffer les revendications, les «forces de l’ordre» brutalisent, tuent et paralysent les populations anglophones. Des images circulent sur les réseaux sociaux et étalent les violences sur une population qui ne demande qu’à être écoutée. Certains ministres zélés ont choisi la manière forte en menaçant de poursuites judiciaires, de graves sanctions et de prisons tous ceux qui véhiculent sur la toile des informations «fausses et erronées». Internet est coupé au Cameroun Occidental car cette pieuvre tentaculaire est à la source des mouvements contestataires en cours. La brutalité du pouvoir est choquante à travers les images qui circulent. Ce n’est pas la réponse appropriée à une légitime revendication. La volonté de taire tout un peuple traduit la brutalité des autorités. Elles ne tolèrent pas les médias qui échappent à leur contrôle.

Les pouvoirs en Afrique s’activent à couper le net. Ils s’affolent car leurs mensonges depuis les indépendances ne font plus recette. La justice est saisie pour un délit nouveau. Mais, lequel ? L’anonymat du net est parfois critiquable. Mais il est devenu le seul moyen pour dénoncer les dérives des pouvoirs absolus.

Tel membre du gouvernement, pour plaire à son président, promet des représailles, des sanctions, des «procès exemplaires» pour dissuader les internautes. A ce rythme, il va falloir construire de nouvelles prisons.

Internet n’est la propriété de personne et ses mutations sont imprévisibles. Les pouvoirs publics gagneraient à libérer les objecteurs de conscience et à dynamiser la jeunesse par une dose de démocratie et de transparence pour lutter contre les maux hérités de la colonisation : corruption, népotisme, tribalisme, vol des deniers publics. Internet est devenu un contre-pouvoir d’une élite enfermée dans ses mensonges et aveuglée par ses préjugés. Il serait malvenu de bloquer Internet qui est un support de lutte contre les dictatures. Internet survivra, avec ses vérités, ses mensonges et ses délations.

La révolution Internet n’est pas seulement un outil de développement économique et social. Elle nous aide aussi à nous transformer pour transformer nos peuples. Qu’on se le dise!

Boko Haram: l’aide américaine est difficile à évaluer (expert camerounais)

Manassé Aboya Endong, politologue camerounais évoque ici le facteur temps et le manque d’informations précises sur l’adversaire

L’aide américaine accordée au Cameroun dans sa lutte contre Boko Haram est à la fois «nécessaire» et «précieuse» selon un politologue camerounais qui juge toutefois que l’évaluation de l’efficacité de cette aide est encore « impossible à l’heure qu’il est » étant donné le facteur temps et le manque de données concrètes sur l’adversaire.

Dans sa lutte contre Boko Haram, le Cameroun est bien appuyé par ses partenaires internationaux, il l’est, notamment, par les États-Unis qui, non seulement, offrent du matériel militaire à l’armée du pays, mais y ont également, récemment, dépêché des soldats pour participer à cette lutte.

Le gouvernement américain avait annoncé à la mi-octobre l’envoi de 300 soldats au Cameroun pour participer à la lutte contre Boko Haram précisant que ces forces se consacreront à des « opérations de renseignement, de surveillance et de reconnaissance aérienne », et qu’elles « seront armées pour assurer leur propre protection et permettre le bon déroulement de ces opérations sans être appelées à participer aux combats ».

A ce jour, un premier contingent de 90 hommes se trouve déjà en territoire camerounais, plus précisément à Garoua dans le nord du pays, région particulièrement ciblée par le groupe terroriste nigérian.

Cette aide est aussi nécessaire qu’utile mais elle ne peut, toutefois, pas encore être évaluée, estime le politologue et universitaire camerounais Manassé Aboya Endong.

« A partir des drones déployés dans les endroits stratégiques et d’autres moyens technologiques, les soldats américains sont appelés à étudier le système de mobilité des éléments de Boko Haram, à intercepter les communications afin d’articuler à moyen ou à long termes, la prévisibilité des attaques contre le Cameroun, voire l’éventualité de l’exportation des djihadistes vers le sol américain », a précisé, à ce propos, Aboya Endong.

Toutefois, toujours selon l’expert, l’évaluation de l’efficacité de cette aide est encore précoce, il juge, en effet, qu’ « il faut un peu plus de trois mois pour pouvoir juger de son efficacité ».

Selon lui, l’évaluation de l’efficacité d’une intervention militaire nécessite plus de temps et dans ce cas de figure précis « il ne s’agit pas d’une guerre conventionnelle où deux armées connues s’opposent l’une à l’autre mais d’une guerre asymétrique où une armée combat une nébuleuse: un groupe terroriste ».

« La capacité, l’équipement, les sources de financement du groupe terroriste sont inconnus, donc plus difficile à évaluer que lorsqu’il s’agit, par exemple, des armées de deux pays ».

Aboya Endong souligne en outre que les soldats américains arrivent dans la partie septentrionale du Cameroun après les militaires français qui y sont également déployés.

Cependant, l’éventualité d’une coordination militaire franco-américaine n’est nullement perceptible sur le terrain et « encore moins envisageable », selon Aboya Endong.

« Chacune de ces deux puissances joue, prioritairement, sa propre partition. Mieux, chacune d’elle ne joue sur le terrain que la carte de ses propres intérêts », ajoute l’expert.

En l’absence d’une coopération concrète entre les puissances occidentales, il pourrait sembler contreproductif d’avoir à la fois les Français et les Américains sur le même terrain.

« A priori on pourrait penser à une contre-productivité, compte-tenu de l’imprévisibilité et de la quasi-impossibilité de contrôler des acteurs par essence très complexes. Toutefois, la menace étant globale et concernant la totalité des Etats ciblés par la perspective d’instauration d’un Califat Islamique, aucun partenaire international ne saurait être de trop », a encore affirmé le politologue.

Selon lui « la guerre contre le terrorisme est une lutte lente, mais permanente, elle nécessite du courage et se gagne dans le temps, jamais dans la précipitation ».

La ville de Garoua où sont déployés les soldats américains fait partie de la troisième région militaire interarmées. Cette région militaire est placée sous le commandement du général de brigade Fréderic Ndjonkep qui a récemment affirmé à la presse qu’il dispose de « près de 1 000 hommes ».

L’armée camerounaise au front.
Droits réservés)/n

Nigeria: Récompense pour retrouver l’auteur d’un attentat contre l’ONU

La police nigériane offre 25 millions de nairas soit 160.000 dollars pour des informations sur le cerveau de l’attentat du 26 août

Les Services de sécurité de l’Etat (SSS) souhaitent avoir des informations qui puissent permettre d’arrêter et d’inculper Mamman Nur, identifié comme le cerveau de cette attaque. Les personnes susceptibles d’être en possession de telles informations doivent se rendre au poste de police le plus proche ou dans des locaux militaires ou, ceux des agences de sécurité. Une attaque suicide a visé le 26 août les locaux des Nations unies à Abuja, tuant 23 personnes et en blessant plus d’une centaine. Cet attentat a été revendiqué par Boko Haram, une secte islamiste nigériane soupçonnée d’avoir des liens avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). D’après le SSS, le planificateur de cette attaque serait un homme lié à Boko Haram et à Al Qaïda, Mamman Nur, récemment revenu de Somalie. Le général Carter Ham, chef du commandement américain pour l’Afrique (AFRICOM), a affirmé cette semaine que Boko Haram, Aqmi et les islamistes shebab de Somalie avaient l’intention de collaborer plus étroitement ensemble et de synchroniser leurs actions. Une vidéo, obtenue et qui aurait été réalisée par Boko Haram, montre l’auteur présumé de l’attentat suicide. Le suspect y explique son geste à sa famille. Mince, souriant, s’exprimant calmement, le jeune homme à la tête enturbannée tient la plupart du temps une AK-47.Un homme se présentant comme un porte-parole de la secte islamiste, Abu Qaqa, a affirmé, dans un entretien téléphonique avec l’AFP, qu’il s’agissait de Mohammed Abul Barra, un mécanicien de 27 ans, marié et père de famille, qui vivait à Maiduguri, ville du nord-est du pays où Boko Haram est particulièrement active.

Une autre vidéo, également diffusée par l’AFP, montre un homme présenté comme l’auteur d’une attaque suicide contre le siège de la police à Abuja en juin qui avait fait au moins deux morts. Ces vidéos contiennent des interventions d’un homme qui serait le numéro un de Boko Haram, Abubakar Shekau. Une insurrection de la secte en 2009 dans le nord-est du pays avait été violemment réprimée par les forces de l’ordre, faisant des centaines de morts, mais cela n’a pas mis fin à ses activités. L’attentat n’a pas été revendiqué mais une secte islamiste appelée Boko Haram a revendiqué plusieurs attaques à la bombe dans le passé, cependant jamais de cette ampleur. Le siège de la police nationale à Abuja avait été la cible en juin d’un attentat à la bombe ayant fait deux morts, revendiqué pas Boko Haram. Une employée des Nations unies a affirmé que beaucoup de personnes avaient été prises au piège à l’intérieur du bâtiment de plusieurs étages. Une partie de la façade de l’immeuble semblait ravagée selon des images montrées à la télévision. Le siège de l’ONU à Abuja abrite plusieurs agences onusiennes opérant au Nigeria, parmi lesquelles l’Unicef, le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Une porte-parole de l’Office de coordination des affaires humanitaires (OCHA), également une agence de l’ONU.

La tête de Mamman Nur, mise à prix
gbooza.com)/n

Emeutes de février 2008, le contexte des troubles socio-politiques

La vie chère et les revendications politiques au centre des manifestations

Il y a un an les grandes métropoles du Cameroun étaient prises d’assaut par des vastes mouvements d’humeur qui ont, non seulement causé d’importants dégâts matériels, mais aussi et surtout, endeuillé de nombreuses familles camerounaises.
Ces mouvements d’humeur interviennent dans un contexte marqué par la hausse du prix du carburant à la pompe. Les syndicats de consommateurs et des transporteurs attiraient déjà l’attention des pouvoirs publics sur les éventuelles conséquences qui pourraient résulter d’une telle hausse du prix du carburant. Certains syndicats des transporteurs avaient même déjà envisagé l’éventualité de la hausse du prix du taxi pour compenser cette autre hausse du carburant de 15 francs CFA survenue le 7 février 2008. La coupe d’Afrique des nations de football à laquelle prennent part les lions indomptables, préoccupent les esprits au point où la hausse ne ferra pas grand bruit à travers le pays, le Cameroun étant une nation du football.

Malheureusement quelques jours plu tard la fièvre gagne les marchés camerounais avec notamment la hausse des prix des produits de première nécessité. Le panier de la ménagère n’arrive plus à se remplir. À cela vont s’ajouter l’inflation, les pénuries fictives créées par des commerçants véreux qui profitent de la situation pour s’enrichir. Malgré les ordonnances du chef de l’état signées bien avant mais jamais traduites en actes concrets sur les marchés, les descentes du ministre du commerce et les leaders des associations de défense des consommateurs, les hausses de prix gagnent le terrain et n’épargnent aucun secteur. Par ailleurs une rumeur d’une éventuelle hausse du prix du pain plane.

Des jeunes dans la rue
journalducameroun.com)/n

Les émeutes de février interviennent aussi dans un contexte marqué par le projet de révision de la constitution camerounaise qui devrait permettre au président Paul Biya de se représenter à l’élection présidentielle de 2011.Le projet va rencontrer une vive opposition des leaders politiques et de la société civile camerounaise. Dans la région du littoral, le gouverneur Faî Yengo Francis avait pris des mesures préventives en interdisant systématiquement les marches et autres manifestations de l’opposition mais en tolérant celles qui allaient dans le sens des motions de soutien au chef de l’état. L’opposition, surtout le sdf, se voit interdire des meetings à douala. Le 16 février Mboua Massock est interpellé par les forces de police lors d’un meeting à bépenda et déporté vers yabassi. Joe la conscience, artiste engagé et leader d’opinion, avait envisagé une marche de Loum vers Yaoundé, le 17 février il est arrêté. A Bamenda, le 15 février les rues sont envahies par les forces de l’ordre surtout au moment où le parti de l’opposant John Fru Ndi organise une rencontre avec les jeunes sur « le rôle des jeunes dans la social démocratie ». Le 13 février une autre conférence du sdf est interdite par les autorités de la ville, les militants du parti seront dispersés par des gaz lacrymogènes.

Les troubles socio-politiques interviennent également dans un contexte marqué par la montée vertigineuse du chômage des jeunes. Malgré l’atteinte par le Cameroun du point d’achèvement, de l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés en 2006, ou encore la signature du C2D avec la France, les signes criards du chômage et du sous- emploi sont visibles. Tous ces faits combinés, ont favorisé la montée en force d’un mécontentement généralisé surtout au près d’une jeunesse en perte de repères et exposée à diverses formes de déviances sociales et sociétales. Une jeunesse qui rêve elle aussi d’une promotion sociale dans un pays où, malheureusement, les fruits de la croissance peinent encore à servir véritablement à la lutte contre la pauvreté et la misère des populations.

On a compté des morts
journalducameroun.com)/n

Emeutes au Cameroun: Ils ont dit!!!

Nous recensons ici les propos tenus par quelques leaders de la société par rapport aux émeutes

« Nous recensons ici les propos tenus par quelques leaders de la société camerounaise par rapport aux émeutes dites de la faim. »
Paul Biya, Déclaration à la Nation du 27 Février 2008

« Les apprentis sorciers qui dans l’ombre ont manipulé ces jeunes ne se sont pas préoccupés du risque qu’ils leur faisaient courir en les exposant à des affrontements avec les forces de l’ordre. »
Marafa Hamidou Yaya, ministre de l’administration territoriale et de la décentralisation. Point de presse du 10 Mars 2008

« Je dois saluer l’action, mais surtout la tempérance des forces de maintien de l’ordre qui n’ont pas fait un usage abusif de leurs armes, malgré les nombreuses provocations auxquelles elles étaient sujettes. De manière spécifique à Douala, beaucoup de morts sont le résultat des rixes entre des bandes de gangsters qui ont infiltré la contestation. Le partage des biens volés à la suite d’actes de pillage a donné lieu à des disputes violentes entre les bandits. Et certains ont été victimes du phénomène de justice populaire. »
Joshua Osih, le vice-président du Social Democratic Front (SDF

« Ce qui est grave, c’est qu’on a l’impression que le président prend la situation à la légère. J’ai vu quelques photos des victimes des émeutes de février 2008 ici à Paris. Je pense qu’il revient aux Camerounais de prendre conscience. Biya ne peut pas faire le travail seul. Il n’a pas demandé à être chef de l’Etat au Cameroun, c’est le grand destin qui a joué. Les camerounais l’ont trahi. C’est le fils de quelqu’un aussi ! Il nous revient de prendre la gestion de notre pays en main. A partir du moment où certains organisent des scènes de pillage malhonnêtes, je vois le Cameroun sombrer dans les abîmes. C’est désolant! »
Ayissi LEDUC, artiste musicien

Emeutes de Février 2008 au Cameroun: Le discours de Paul Biya

Intégralité du discours du 27 février 2008

« Notre pays est en train de vivre des événements qui nous rappellent les mauvais souvenirs d’une époque que nous croyions révolue.
Si l’on peut comprendre qu’après l’échec d’une négociation, une revendication catégorielle s’exprime par l’exercice du droit de grève, il n’est pas admissible que celui-ci serve de prétexte à un déchaînement de violence à l’encontre des personnes et des biens. D’ailleurs, la preuve est maintenant faite qu’il est toujours possible de trouver une solution par la négociation à tout conflit social.
Il ne s’agit pas de cela en réalité. Ce qui est en cause, c’est l’exploitation, pour ne pas dire l’instrumentalisation, qui a été faite de la grève des transporteurs, à des fins politiques. Pour certains, qui n’avaient d’ailleurs pas caché leurs intentions, l’objectif est d’obtenir par la violence ce qu’ils n’ont pu obtenir par la voie des urnes, c’est-à-dire par le fonctionnement normal de la démocratie.
Ils n’ont donc pas hésité à jeter dans la rue des bandes de jeunes auxquels se sont mêlés des délinquants attirés par la possibilité de pillages. On en voit le résultat : des bâtiments publics détruits ou incendiés, des commerces et des entreprises pillés ou dévastés. Qu’il s’agisse du patrimoine de l’État, c’est-à-dire de notre bien commun, ou de locaux privés, ce sont des années d’efforts ainsi réduits à néant.
Les apprentis sorciers qui dans l’ombre ont manipulé ces jeunes ne se sont pas préoccupés du risque qu’ils leur faisaient courir en les exposant à des affrontements avec les forces de l’ordre. Plusieurs d’entre eux ont de ce fait perdu la vie, ce qu’on ne peut évidemment que regretter.
Lorsque le bilan humain et matériel de ces sombres journées pourra être fait, il sera probablement très lourd. Ceux qui sont derrière ces manipulations ne voulaient certainement pas le bien de notre peuple. On ne bâtit pas un pays en multipliant les ruines.

Il faut donc que les choses soient bien claires. Le Cameroun est un État de Droit et entend bien le rester. Il a des institutions démocratiques qui fonctionnent normalement. C’est dans ce cadre que sont traités les problèmes de la Nation. Ce n’est pas à la rue d’en décider.

L’immense majorité de notre peuple aspire à la paix et à la stabilité. Les dernières consultations électorales en ont apporté la preuve. Les Camerounais savent que le désordre ne peut apporter que malheur et misère. Nous ne le permettrons pas.
A ceux qui ont pris la responsabilité de manipuler des jeunes pour parvenir à leurs fins, je dis que leurs tentatives sont vouées à l’échec. Tous les moyens légaux dont dispose le Gouvernement seront mis en uvre pour que force reste à la loi. »


journalducameroun.com)/n

Emeutes au Cameroun, les médias camerounais s’en souviennent!

Un an après, certains médias racontent comment ils ont vécu cette période.

Nous avons suspendu le programme « A vous l’antenne » qui était une émission inter active, la situation qui prévalait pouvait être une occasion pour les populations d’appeler pour dire n’importe quoi. Nous avons opté pendant cette période pour des informations en continue sur l’actualité. Pour y parvenir, nous avons déployé nos reporters dans certains secteurs stratégiques de Yaoundé, tels que le Palais présidentiel, Mballa II, Ngoa-Ekellé, la prison, Mbankolo, les banques, ainsi que dans certaines villes du pays à l’instar de Douala, Ebolowa, Bamenda, Bafang.
Eugène Messina, chef de chaîne Radio Tiémeni Siantou

Les émeutes de février 2008 n’ont pas épargné les médias camerounais. Si ici et là on remercie le ciel que les manifestants n’aient pas saccagés les studios et autre salles de rédaction, on reconnaît toutefois que le fonctionnement au quotidien a du être modifié. A la télé, à la radio comme dans la presse écrite, les grilles de programmes ont dû être retouchées afin de rendre compte aux populations de l’évolution des évènements.
Ce fut le cas à la radio Tiemeni Siantou (RTS). Au regard de la délicatesse de la situation qui prévalait, la direction de la radio avait pris un certain nombre de dispositions. « Nous avons suspendu le programme « A vous l’antenne » qui était une émission inter active, la situation qui prévalait pouvait être une occasion pour les populations d’appeler pour dire n’importe quoi. Nous avons opté pendant cette période pour des informations en continue sur l’actualité. Pour y parvenir, nous avons déployé nos reporters dans certains secteurs stratégiques de Yaoundé, tels que le Palais présidentiel, Mballa II, Ngoa-Ekellé, la prison, Mbankolo, les banques, ainsi que dans certaines villes du pays à l’instar de Douala, Ebolowa, Bamenda, Bafang » explique Eugène Messina, chef de chaîne Radio Tiémeni Siantou.

Les villes étaient coupées et l’imprimerie Macacos ne pouvait pas travailler, car située en plein c ur de la ville de Douala. Au plan situationnel, nous avons trouvé une imprimerie à Yaoundé où nous imprimions le journal. Il était uniquement vendu à Yaoundé. Nos lecteurs de Douala pouvaient l’avoir sur le Site.
Alain Blaise Batongue, Directeur de publication du Quotidien Mutations

Si dans les studios des radios le travail se déroulait malgré tout, tel ne fut pas toujours le cas au niveau de la presse écrite. La paralysie des activités ayant contraint les imprimeries à fermer, la parution des journaux dans les kiosques était devenue difficile voire impossible. « Les villes étaient coupées et l’imprimerie Macacos ne pouvait pas travailler, car située en plein c ur de la ville de Douala. Au plan situationnel, nous avons trouvé une imprimerie à Yaoundé où nous imprimions le journal. Il était uniquement vendu à Yaoundé. Nos lecteurs de Douala pouvaient l’avoir sur le Site », affirme Alain Blaise Batongue, le directeur de publication du Quotidien Mutations.
Les mêmes contraintes étaient vécues du côté des télévisions locales. Bravant l’hostilité des manifestants mais surtout des forces de l’ordre, les chasseurs d’images traquaient l’information au risque de perdre leurs cameras. A Canal 2 international comme à STV, Les directions des programmes avaient d’ailleurs créé pour la circonstance, des émissions spéciales afin de commenter le déroulement des émeutes.

Mutations
journalducameroun.com)/n

Au-delà des charges financières énormes imposées par cette situation, le travail des reporters sur le terrain n’était pas une mince affaire. « C’était une période très dangereuse. Je me suis retrouvé dans le secteur de Mokolo, Poste Centrale où les violences étaient très accentuées, les gens courraient de toute part et tous ceux qui passaient étaient systématiquement arrêtés par les policiers. Ces derniers faisaient asseoir tout le monde sans tenir compte que vous soyez journaliste ou pas. On était obligés de se boucher les narines avec nos vêtements de peur d’aspirer le gaz » se souvient Eugène Messina. A Mutations, en plus des journalistes sur le terrain, ce sont les vendeurs à la criée qui étaient la cible des manifestants en furie. « Nous pensions que nous écrivions pour le bien des manifestants mais ce sont ces mêmes manifestants qui pourchassaient nos vendeurs à la criée, leur interdisant de vendre les journaux » reconnaît Alain Blaise Batongue.
Une période bien difficile pour les médias. Mais qui gardent la satisfaction d’avoir pu informer les populations au quotidien sur l’évolution de la situation. « Nous avons beaucoup dépensé, mais, nous ne regrettons pas d’avoir autant investit pour ces mouvements sociaux », explique Alain Blaise Batongue.

Alors qu’à la RTS et à Mutations les émeutes de février 2008 se conjuguent en termes de dégâts matériels et financiers, le souvenir est encore plus amer pour Magic FM à Yaoundé et Equinoxe à Douala. Les deux médias ont été fermés pendant ces périodes. Elles payaient ainsi le prix de l’organisation des émissions inter actives sur la révision de l’article 6.2 de la constitution, qui allait permettre au président Paul Biya de se représenter à l’élection présidentielle de 2011.


journalducameroun.com)/n